Galtier : "On ressemble un peu à Liverpool"
jeudi 20 octobre 2016
Résumé de l'article
Dans une longue interview pour UEFA.com, le coach de Saint-Étienne Christophe Galtier parle de la prochaine journée de l'UEFA Europa League, mais aussi de l'Histoire du club et rapproche à sa manière le vert du rouge.
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Saint-Étienne se prépare pour une double confrontation face à Gabala, à domicile le 20 octobre, puis en Azerbaïdjan, le 3 novembre en UEFA Europa League, avec des chances de qualifications intactes et de grosses qualités mentales qui lui ont permis d'obtenir le nul contre Anderlecht.
Christophe Galtier évoque Gabala, la saison de l'ASSE, et ce que le club dont il dirige l'équipe première depuis 2009 signifie pour lui.
Le Marseillais de 50 ans a mené les Verts à la victoire en Coupe de la Ligue en 2013. L'ancien défenseur a commencé sa carrière de joueur dans sa ville natale, Marseille. Il a été l'adjoint d'Alain Perrin, à Saint-Étienne, avant de devenir l'entraîneur principal du club de la Loire.
UEFA.com :
Christophe, vos sentiments après ce match nul arraché en fin de match face à Anderlecht...
Christophe Galtier : Cela a permis de rester au contact d'Anderlecht. Si Anderlecht l'avait emporté, ils avaient deux fois trois points. Le fait d'avoir égalisé à la dernière minute nous évite un écart plus important. On est à la fois à deux points de Mayence et à deux points d'Anderlecht. Nous allons avoir une double confrontation avec la réception de Gabala et puis nous allons jouer à Gabala.
Je pense que la double confrontation va être déterminante dans cette compétition. Après, le match en lui-même n'était pas un match de très haut niveau. On a fait une bonne première période mais en second on a souffert. Il y'avait tellement d'absences dans le groupe que c'était difficile de faire un très bon match. On est très satisfait de pouvoir arracher le point de match nul à la dernière minute.
Justement, avec la double confrontation avec Gabala à venir. Faut-il faire carton plein ?
Ce serait bien. Ce serait important, même si Gabala sera une équipe difficile à jouer. Elle n'a pas encore gagné un match mais sur ce que j'ai vu et ce que nous avons observé, ils ont de la qualité. Ils ne lâchent rien. Ils marquent des buts. Cette équipe-là a éliminé dans les tours préliminaires une équipe française, Lille. Il faut évidemment les prendre au sérieux, mais sur cette double confrontation, l'idéal serait de faire un maximum de points. Comme la saison dernière, après deux journées on n'avait qu'un point, un match nul face à Rosenborg, on avait perdu face à Lazio de Rome. On a gagné la double confrontation contre Dnipro. Si on arrive à faire la même chose on aura fait un grand pas pour envisager la qualification.
Le déplacement en Azerbaïdjan n'est pas un voyage en terre inconnue pour votre groupe après les matches contre Qarabag il y a deux saisons...
Il y a deux saisons on est allé à Qarabag. On a joué dans un stade où il y'avait du monde. Là on ne joue pas dans le même stade mais dans un stade plus petit ou il y a aussi une grosse ambiance. On est prêt dans l'organisation parce qu'on a eu cette expérience-là, ce vécu. Il y a un voyage et un peu de décalage horaire. On joue bien de l'expérience acquise depuis deux saisons. On va se déplacer dans les meilleures conditions pour permettre à l'équipe de faire un résultat là-bas.
Parlez-nous de la force mentale de votre groupe, avec ces deux matches nuls arrachés en fin de rencontre en Europe, et ça se passe un peu comme ça en championnat également ?
À défaut d'avoir la qualité dans le jeu, parce qu'il y a beaucoup de mouvement dans l'équipe à cause de blessures... Avec l'absence des joueurs c'est difficile de trouver des automatismes. On a cette qualité là, cette force mentale. J'ai un groupe qui est irréprochable dans la détermination, la mentalité. Chacun joue pour l'autre, chacun joue pour l'équipe. C'est une satisfaction pour moi. Il faudra avoir dans les prochains matches de Coupe d'Europe, j'espère retrouver l'intégralité de l'effectif, garder cet état d'esprit, cette force collective, mais aussi améliorer notre jeu pour être plus efficace.
Ça change un peu de l'année dernière quand il y a eu cette élimination un peu douloureuse dans le temps additionnel contre Bâle...
Je ne peux pas dire qu'il y ait un travail spécifique, mais le fait d'avoir arraché dans les matches de championnat les victoires ou des matches nuls, je pense à Paris à la dernière minute pour un match nul, contre Bastia à la dernière minute pour le gagner, ça permet de toujours y croire. Cela nous permet de croire qu'on peut toujours gagner un match sur la fin. Tant qu'il n'y a pas un écart de buts important on peut toujours revenir au score. On est arrivé à le faire deux fois en Coupe d'Europe et c'est très important, c'est significatif. Mais il n'y a pas un travail spécifique là-dessus. C'est une prise de conscience collective et ça il faut l'entretenir, il faut faire en sort de le développer. On essaie de le faire tous les jours par le dialogue qu'on a avec le groupe.
Avec ce vécu européen, est-ce que l'approche a changé ?
Oui, par rapport à la première campagne européenne, nous avions perdu, je crois, qu'un match et on a fait cinq matches nuls. On s'est aperçu que, finalement, sans gagner c'est très difficile de se qualifier. On croit toujours qu'on peut mais l'analyse et ce que j'avais retenu de la première campagne, c'était qu'il fallait prendre beaucoup plus de risques dans le jeu pour gagner. C'était important de gagner. C'est ce que nous avons réussi à faire la saison dernière. On est arrivé à gagner des matches, ce qui nous a permis de se qualifier. Et là, même si on a égalisé contre Mayence et contre Anderlecht avec une équipe très diminuée, il faut prendre beaucoup plus de risques dans le jeu pour aller chercher la victoire.
Saint-Étienne est une vraie ville de foot. Pour vous qu'est-ce que le foot représente dans cette ville ?
Vous savez, il y a quelques années en arrière, il y avait beaucoup d'usines, beaucoup d'activités professionnelles, il y avait la mine. Dans les usines on fabriquait beaucoup ici. Ce temps-là est révolu et aujourd'hui il reste de cette époque-là les Verts. Déjà à l'époque c'était la fierté de tous les habitants du département ou la ville. Aujourd'hui il n'y a plus cette activité professionnelle mais le club fait toujours la fierté des habitants, des supporters.
Cela se transmet de génération en génération. On voit souvent au stade le grand-père avec son petit-fils. Cela commence automatiquement. Quand le petit-fils a son enfant il va l'emmener au stade. Je trouve qu'il y a une grande similitude avec Liverpool. J'ai passé un peu de temps à Liverpool et je connais l'histoire de Liverpool. On se ressemble – pas avec les mêmes moyens – mais dans l'esprit et dans les valeurs on ressemble énormément à Liverpool.
Déjà on est la seule équipe qu'on s'appelle par sa couleur. On dit rarement Saint-Étienne, on dit les Verts. Les médias, les gens, je me rends compte quand je les croise, pour eux nous sommes les Verts. C'est la même chose à Liverpool. On dit les Reds. On est une des rares équipes en Europe qu'on appelle par sa couleur. La couleur verte est très importante, et on a une responsabilité, un devoir, quand on défend cette couleur, qu'on porte cette couleur
Saint-Étienne est connue pour l'ambiance chaude à chaque match. Est-ce que ça pousse votre équipe à faire des exploits ?
Oui, c'est l'histoire qui a fait ça. La grande épopée européenne, les grandes épopées, dans les années 70 et 80. C'était évidemment la qualité des joueurs dans l'équipe, la qualité d'entraîneur, mais aussi la grande qualité de son public avec les gens qui étaient omniprésents, qui encourageaient, pour que son équipe ne baisse jamais les bras. Ils ont renversé des situations incroyables ici. On retrouve ça aujourd'hui, 40 ans après. Le même comportement, la même ferveur, la même passion dans les tribunes. Quand vous parlez avec les joueurs qui sont passés par ici, qui ont pu faire des grandes carrières après, ils disent toujours qu'ils n'oublieront jamais la passion, la ferveur qu'il y a dans Le Chaudron.
Quelque 40 ans après la finale à Hampden Park, est-ce que le groupe actuel est au courant de l'histoire des Verts ?
Oui, même si il y a 40 ans, personne n'était né sauf moi. Bien sûr il y a aussi la volonté de la part du club et l'entraîneur de transmettre l'histoire "ici les gens ont fait ça". Il y a un devoir de mémoire important sur lequel on travaille aussi avec les joueurs qui arrivent qui ont entendu parler automatiquement des Verts. Ils n'ont pas vu les matches, mais ils ont la possibilité d'aller au musée. On transmet l'histoire et les joueurs sont très curieux de voir ce qu'il y avait avant.
Y a-t-il une possibilité de marquer l'histoire cette année ?
Mon rêve absolu serait de faire une très grande campagne européenne. De là à dire qu'on peut gagner l'Europa League, je ne sais pas si on peut dire ça. La seule chose qu'on ne peut pas enlever à l'homme, c'est de rêver. Rêver, être ambitieux, ce n'est pas prétentieux. Il faut croire dans nos capacités, et il faut croire aux rêves. J'espère qu'on puisse vivre une grande campagne européenne. Je sais que c'est difficile, il y a des équipes beaucoup mieux armées que nous, mais des fois avec un peu de réussite, un peu de chance et une grande détermination, on crée des exploits.
Pendant votre carrière vous avez déjà connu l'Europe, quand vous étiez l'adjoint à Olympique Lyonnais, est-ce que ça vous a aidé en tant que coach principal ?
On a fait une campagne européenne avec Lyon et on est allés en 8es de finale de Champions League face à Manchester. J'ai eu aussi une campagne européenne avec Marseille en Champions League en 1999, et ce vécu-là, à la fois Marseille, Lyon et la première campagne donne plus de lucidité sur les analyses et les choix à faire.
Pour revenir à l'importance du club, quand vous voyagez à l'étranger, est-ce que vous pensez qu'on associe tout de suite Saint-Étienne au football ?
Oui. Saint-Étienne c'est les Verts. Les Verts c'est Saint-Étienne.
Donc une importance en France et sur le plan européen pour le club ?
C'est difficile de dire que c'est une importance pour le foot français parce que Saint-Étienne a été dépassé depuis des années par d'autres clubs, des clubs hyper-médiatisés. On peut parler de la mondialisation du PSG avec un pouvoir financier extraordinaire.
Il y a Lyon, un voisin qui est aussi un concurrent énorme pour les Verts. Les Lyonnais qui depuis 20 ans ont fait des campagnes européennes. Et il y a Marseille, ce club très populaire en France, mais pour voyager assez souvent à titre professionnel ou en famille, quand vous parlez de Saint-Étienne on parle automatiquement du football et des Verts.