Des vallées aux Alpes : le parcours du Pays de Galles jusqu’à l’EURO féminin de l’UEFA 2025
lundi 7 juillet 2025
Résumé de l'article
Lorsque le Pays de Galles entrera en lice contre les Pays-Bas samedi, la vice-présidente de l’UEFA Laura McAllister sera particulièrement fière de voir cette équipe faire ses débuts dans un tournoi majeur.
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Pour McAllister, ancienne capitaine de la sélection galloise et actuelle présidente suppléante de la Commission du football féminin de l’UEFA, ce match est une étape clé dans le développement du football au Pays de Galles.
Elle explique ici comment des investissements intelligents et une inébranlable soif de victoire ont aidé le Pays de Galles à passer ce cap et se projette vers un avenir radieux pour le football féminin dans toute l’Europe.
Laura, êtes-vous excitée et fière à l’idée que le Pays de Galles soit sur le point de débuter son tout premier EURO féminin ?
Je suis incroyablement excitée et très, très fière que nous ayons parcouru tout ce chemin, parce que cela a pris du temps.
J’ai joué dans la première équipe galloise officielle en 1994 et c’était un grand honneur, bien entendu. Mais nous avons toujours su que cela serait difficile pour nous de nous qualifier à l’époque, c’est pourquoi cette première qualification revêt une importance particulière. Cela enlève un grand poids de nos épaules.
Si vous parlez à n’importe quel·le entraîneur·e d’une association qui s’est qualifiée pour la première fois, il/elle parle toujours de la légèreté ressentie après et du sentiment éprouvé lorsque l’on touche au but. Je suis très fière qui nous y soyons parvenus.
Quels sont vos espoirs pour le Pays de Galles dans le tournoi ?
Nous ne venons pas en Suisse pour faire de la figuration. Nous avons confiance dans notre équipe et nous avons peut-être l’une des meilleures entraîneures, nous avons beaucoup de chance d’avoir Rhian Wilkinson avec nous.
Nous avons tout ce qu’il faut et lorsque vous participez à un tournoi comme celui-ci pour la première fois, vous pouvez passer sous les radars. Tout le monde connaît les joueuses des plus grandes nations et leur organisation, tandis que pour nous, les gens ne s’attendent pas à ce que nous soyons une des équipes qualifiées du groupe D, mais nous pensons que nous pouvons le faire.
En tant qu’ancienne joueuse, auriez-vous aimé faire partie de cette équipe galloise qui va participer au tournoi ?
Je ne peux rien imaginer de mieux que de porter le maillot gallois, d’écouter l’hymne national et de voir notre drapeau, qui est le plus beau du monde, mais nous sommes tous un produit de notre époque, ete suis très fière d’avoir joué pour le Pays de Galles à mon époque.
Je suis fière que nous ayons ouvert la voie pour les filles qui sont venues après nous et maintenant cette équipe va ouvrir la voie à la prochaine génération de filles. Je suis très enthousiaste pour elles et j’ai hâte d’assister au premier match à Lucerne.
Verrons-nous le fameux « mur rouge » du Pays de Galles en Suisse ?
Bien sûr que nous allons voir le « mur rouge » ! Nous avons vendu 2500 billets par l’intermédiaire de nos canaux de vente officiels, mais il y a évidemment des personnes qui ont acheté des billets lors de ventes au grand public et nous aurons un bon contingent à Lucerne et à Saint-Gall.
Je suis aussi très heureuse du profil des supporters : il y a beaucoup de femmes, beaucoup de joueuses et d’entraîneurs faisant partie de la communauté du football, mais aussi beaucoup de familles. Je pense que nous avons réussi à comprendre notre base de supporters au Pays de Galles, à investir dans celle-ci et à l’écouter. Nous avons eu de formidables affluences récemment, notamment 18 000 spectateurs pour notre match de barrage contre la République d’Irlande.
Donc il y a une énorme envie et maintenant nous devons penser à nos supporters pour qu’ils apprécient cette expérience mais soient aussi prêts à venir à chacun de nos matches, pas seulement aux grands tournois.
Comment la venue de la sélection galloise à l’EURO féminin peut-elle favoriser la croissance du football dans le pays ?
Nous avons investi très intelligemment. Nous sommes une association de taille moyenne, mais nous avons eu d’excellents résultats récemment en football masculin et ce n’était pas normal que le football féminin n’atteigne pas un nouveau palier.
Nous pensions déjà à l’héritage et à l’avenir bien avant la qualification. C’est l’un de nos sujets stratégiques et nous sommes en bonne voie pour dépasser nos objectifs de participation, pas seulement l’augmentation du nombre de joueuses, mais aussi d’entraîneures et d’arbitres.
Depuis 2021, nous avons enregistré une augmentation de 52 % du nombre de joueuses licenciées, avec plus de 19 000 dans notre système, donc près de 13 000 âgées de 6 à 13 ans.
Ces trois dernières années, la Cymru Football Foundation a investi GBP 4 millions (EUR 4,66 millions) pour développer des installations hors des terrains et des vestiaires qui soient inclusifs pour les femmes et les filles, et GBP 4,5 millions (EUR 5,24 millions) pour construire des terrains en gazon synthétique de taille standard offrant des créneaux hebdomadaires spécifiques et protégés pour les femmes et les filles. Nous investissons aussi GBP 500 000 (EUR 582 000) chaque année dans la gestion de deux académies régionales pour les filles.
L’autre volet que nous voulons développer est d’augmenter le nombre de voix féminines dans le football pour avoir des femmes au plus haut niveau du football, dans les comités, les associations régionales et les clubs. La qualification à l’EURO féminin nous donne un énorme coup de pouce et nous permet de faire ces choses plus rapidement.
Mais il ne faut pas commencer à réfléchir à ces choses lorsque l’équipe se qualifie, cela doit faire partie d’un plan plus vaste et il faut être bien préparé pour profiter de l’élan lorsqu’il survient.
Y a-t-il d’autres associations nationales dont le Pays de Galles s’est inspiré pour le développement du football féminin ?
Il y en a quelques-unes. J’ai passé beaucoup de temps au Portugal avec des collègues pour parler de l’organisation du football féminin là-bas et de leur qualification pour la Coupe du monde et maintenant pour trois EURO consécutifs.
Il y a les Pays-Bas et les pays scandinaves, où le football est ancré culturellement chez les filles et les femmes, mais nous montrons maintenant que nous pouvons rivaliser avec ces équipes, en faisant jeu égal avec la Suède en UEFA Women’s Nations League notamment. Lise Klaveness, la présidente de l’Association norvégienne de football, est une bonne amie et une collègue du Comité exécutif de l’UEFA, et nous parlons régulièrement de la façon dont l’association a augmenté les investissements au fil du temps.
Mais il est aussi important que nous ayons notre propre modèle et notre façon de jouer et d’entraîner typiquement galloise. Nos cours de licence Pro de l’UEFA sont parmi les meilleurs d’Europe et de nombreux anciens joueurs très talentueux viennent pour faire leurs licences d’entraîneur avec nous.
Il est également important que l’UEFA et les associations nationales travaillent ensemble pour développer le football féminin, n’est-ce pas ?
Oui, nous ne devons oublier personne et c’est réjouissant de voir que des pays comme Gibraltar, le Liechtenstein et le Luxembourg ont récemment développé leurs équipes nationales féminines et investi dans le football féminin.
Nous ne pouvons laisser personne sur la touche et tous ceux qui travaillent dans le football féminin sont très coopératifs, ils partagent des expériences, des enseignements et des données car c’est dans notre intérêt à tous de rendre les fondations du jeu solide sur l’ensemble du continent et même au-delà.
Au niveau élite, les standards du football féminin augmentent de façon exponentielle avec la professionnalisation croissante. Cela ne signifie pas seulement plus d’argent pour les joueuses, mais aussi améliorer le jeu dans tous ses aspects : de meilleurs terrains, de meilleurs entraîneurs, un meilleur entraînement de la force et de la condition physique, un meilleur soutien médical, bref des améliorations dans tous les domaines.
C’est le but de la nouvelle stratégie de l’UEFA « Unstoppable » et l’investissement général dans le football féminin est fantastique.
Comment l’EURO féminin peut-il continuer à croître après 2025 ?
Je pense que la stratégie « Unstoppable » aidera le tournoi à poursuivre sa croissance organique. Nous avons déjà augmenté les investissements commerciaux et les accords de diffusion qui ont apporté beaucoup de crédibilité et c’est fantastique de vendre 600 000 billets avant même le début du tournoi.
Maintenant, je pense qu’il faut entretenir cette base de supporters car le potentiel de croissance est phénoménal. Beaucoup de ces personnes découvrent le football, et comme elles sont différentes des supporters de football masculin, la façon dont nous développons l’expérience de ces supporters sera donc très importante. Avec la stratégie que nous avons définie, je serai très surprise si nous ne remplissons pas encore plus rapidement les stades avant le prochain EURO féminin en 2029.
Enfin, quel serait votre conseil pour une femme ou une fille qui envisage de suivre votre parcours dans le football ?
Si vous avez la possibilité, faites-le. Nous avons beaucoup de chance de travailler dans le football, et le football féminin est un tel pôle de croissance que cela serait une occasion fantastique pour n’importe qui, quelque soit le domaine choisi, le jeu, l’entraînement, les questions médicales, l’administration ou la gouvernance.
C’est une très bonne période pour entrer dans le football féminin car le jeu se développe si vite et il y a d’énormes possibilités pour toutes de faire une carrière professionnelle dans le sport. Nous avons besoin d’esprits créatifs, de visions différentes et de personnes qui peuvent offrir quelque chose d’excitant et d’innovant.
Saisissez cette occasion, vous le ne regretterez pas. Travailler dans le football sera l’une des expériences les plus excitantes et imprévisibles de votre vie, mais son effet peut être phénoménal.