Dix ans de lutte anglaise contre le racisme
mardi 17 mai 2005
Résumé de l'article
L'Angleterre fait partie des pays les plus avancés pour éradiquer le racisme du monde du football.
Corps de l'article
Par Adam Szreter
L'Angleterre fait partie des pays les plus avancés pour éradiquer le racisme du football.
Un peu d'histoire
Par son histoire, marquée par le colonialisme et l'immigration, l'Angleterre s'est toujours retrouvée aux avant-postes de la lutte contre le racisme dans le football européen. Mais la vraie prise en main du fléau dans les stades date de janvier 1995. Eric Cantona était alors condamné pour avoir frappé un spectateur qui lui avait lancé une injure xénophobe. "Il a fallu qu'un joueur blanc et français se fasse insulter dans notre championnat pour que le problème du racisme soit vraiment pris au sérieux", remarquait le joueur de couleur du Liverpool FC John Barnes.
Une nouvelle campagne
La saison précédente, Lord Herman Ouseley, alors président de la Commission pour l'égalité raciale, avait convaincu l'Association anglaise des footballeurs professionnels (PFA) de se joindre à lui pour lancer une campagne intitulée "Let's Kick Racism Out of Football" (Dégageons le racisme du football). "La première priorité était de faire en sorte que le monde du football arrête le ballon et se dise, 'Il y a un problème ici'", a expliqué Leon Mann de Kick it Out, l'organisation en charge de mener campagne depuis 1997.
Le pouvoir des joueurs
"En partenariat avec la PFA, ils ont alors commencé à attirer l'attention sur le problème, avant que la campagne ne sollicite directement les joueurs afin de bénéficier de l'aura des plus célèbres d'entre eux pour faire passer des messages. Le lancement de la campagne a coïncidé avec l'affaire Cantona, qui est un épisode crucial de l'histoire de cette campagne, mais le plus difficile était de faire comprendre l'étendue du problème aux parties prenantes. Je suis persuadé que nos collègues européens sont confrontés aux mêmes difficultés en ce moment."
Un rôle actif
Une fois la sensibilisation réussie, la deuxième étape a consisté à répondre à la question "que faire ?". "Il nous fallait nous assurer que les clubs comprenaient la nécessité de mettre en place des mécanismes afin que les comportements racistes soient répertoriés et que les victimes soient suffisamment en confiance pour porter plainte et avoir la garantie que leur dossier serait suivi au plus près", a déclaré M. Mann.
Eveiller les consciences
"Ceci a été fait grâce aux joueurs et aux stadiers, mais aussi aux annonces faites par les clubs. Autant de choses qui paraissent tout à fait basiques aujourd'hui. Cependant en terme de sensibilisation du public, ceci n'a pas été simple du tout. Maintenant, à travers les programmes de match et les panneaux publicitaires, les spectateurs ont intégré le fait qu'une campagne anti-raciste était menée. Ils peuvent désormais faire part de leurs expériences après avoir été victime d'injures ou de comportements racistes.
L'implication des clubs
"Il est extrêmement important que les clubs s'engagent dans la campagne. En Angleterre, les 92 clubs professionnels sont tous impliqués à des degrés divers dans la lutte contre le racisme, et je dirais que 75% d'entre eux lancent des initiatives tout au long de la saison. Certains comme [le] Charlton [Athletic FC] et [le] Leicester [City FC] ont fait un travail formidable en direction de leurs communautés."
Le soutien de la police
Il fallait dès lors obtenir l'engagement de la police et s'assurer que la gravité du problème soit bien saisie. "Il a fallu attendre 2000 pour que le Football Act de 1991 soit amendé et que les insultes racistes dans l'enceinte des stades ne soient plus un délit sanctionné d'un simple avertissement, mais d'une exclusion pure et simple du stade", a expliqué M. Mann.
Un accompagnement éducatif
"Il faut bien sûr accompagner tout cela d'un travail éducatif. En agissant dans les écoles, nous avons sensibilisé les jeunes générations", a-t-il ajouté. "En ce moment nous travaillons sur un programme portant sur l'égalité raciale qui comprend notamment des conférences avec les jeunes joueurs sur le racisme, la diversité et l'égalité ainsi que des campagnes d'affichage."
Perspective européenne
"Nous avons vu la situation s'améliorer en Angleterre mais je sais que dans les autres pays européens ce n'est pas le cas. Le fait que seuls 26 des 52 pays affiliés à l'UEFA prennent pour le moment part au financement est proprement décourageant, et d'autant plus quand vous discutez avec des gens, souvent des bénévoles, qui font campagne sans le moindre sou."
Tous unis
"Tant que les gens ne comprennent pas l'importance du problème, nous nous retrouverons face à un mur. Nous avons besoin du soutien des gouvernants. Il est certain que le travail avec les supporteurs est essentiel et fructueux mais le but est de pouvoir travailler avec toutes les parties prenantes du monde du football. Ceci s'est avéré décisif dans notre campagne au Royaume-Uni."