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Exclu. N'Golo Kanté : « Je voulais juste signer pro »

À quelques heures de sa première finale d'UEFA Champions League, N'Golo Kanté se confie à UEFA.com. L'occasion de revenir sur son parcours, de la Ligue 2 au sommet de l'Europe.

N'Golo Kanté, l'homme et demi de Thomas Tuchel
N'Golo Kanté, l'homme et demi de Thomas Tuchel Getty Images

N'Golo Kanté est sans doute l'un des milieux les plus admirés au monde et a déjà ébloui son entraîneur Thomas Tuchel depuis son arrivée en janvier : « Si vous jouez avec N'Golo, vous avez déjà un demi-joueur de plus ».

L'infatigable milieu de 30 ans est l'un des hommes clés de la saison de Chelsea en UEFA Champions League. Il raconte à UEFA.com son incroyable parcours, du rejet des centres de formation en passant par la Ligue 2 jusqu'au sommet européen où il croisera son ancien coéquipier à Leicester au parcours finalement assez similaire, Riyad Mahrez.

N'Golo Kanté face à Toulouse sous les couleurs de Boulogne
N'Golo Kanté face à Toulouse sous les couleurs de BoulogneAFP

UEFA.com : il y a neuf ans, Chelsea était en finale de la Ligue des Champions et vous débutiez en Ligue 2 avec Boulogne face à Monaco. Depuis, vous êtes allé en Angleterre, avez gagné avec l’équipe de France, Leicester, Chelsea. Ses victoires vous ont-elles changé ?
N'Golo Kanté :
Il y a neuf ans quand j’étais à Boulogne avec la réserve, j’ai fait mon premier match pro de Ligue 2, j’avais beaucoup d’envie et d’espoirs dans le foot. Je ne savais pas jusqu’où je pouvais aller, je voulais simplement signer professionnel et faire de mon mieux. Arriver ici avec Chelsea, avoir la chance de jouer une finale de Champions League en passant à tout ce qui s’est passé entretemps, c’est magnifique.

Je pense que ça s’est fait petit à petit, saison après saison, avec des victoires et des défaites, des joies et des déceptions, ça m’a construit en tant que joueur et je pense que cela m’a servi pour être là où je suis et le joueur que je suis aujourd’hui.

Vous êtes connu pour votre humilité, vous prenez ces succès et toute cette médiatisation avec calme. Comment faites-vous pour garder les pieds sur terre, c’est une question d’éducation ?
Non, le football c’est ma passion. C’est le sport que j’aime mais aussi mon métier. Ce que j’aime faire c’est jouer, tout donner sur le terrain, obtenir des résultats et célébrer les victoires. Tout ce qui va autour va avec les résultats mais le principal et ce sur quoi je suis concentré, c’est le terrain, progresser et donner le meilleur de moi-même. En gardant cet état d’esprit, je pense que ça m’a permis de garder la concentration et les objectifs du club dans lequel j’évolue.

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Cela a toujours été le cas, à Caen, à Boulogne, à Leicester en équipe de France ? Un match de football dure 90 minutes et c’est tout ce qui compte ?
C’est sûr. En tant que joueur, la seule chose qui ne change pas est d’aller sur le terrain, d’être à onze contre onze et essayer de gagner le match. Mais à des niveaux différents, des ampleurs différentes. Quand on joue en Champions League, en Coupe du Monde ou dans un club comme Chelsea, on a l’envie de gagner d’être les meilleurs et d’être au top niveau. C’est ce que j’essaye de faire avec le club et c’est différent des années précédentes.

Il y a une photo de vous à Mantes-la-Jolie datant de 2003, vous avez jouez avec Suresnes et j’ai entendu que vos idoles étaient Maradona, Ronaldo et Ronaldinho. Est-ce vrai ? Étiez-vous un joueur comme eux, un joueur qui aime avoir le ballon ?
Je ne pense pas avoir été ce type de joueurs. Je n’étais pas le meilleur ou le plus talentueux, mais je donnais le meilleur de moi-même, j’avais certaines qualités. J’étais souvent surclassé. Je me rappelle de ce tournoi à Mantes-la-jolie, j’étais jeune, c’était un tournoi international. En grandissant, je regardais des vidéos des grands footballeurs, c’était Maradona, Ronaldo, Ronaldinho et avec mes amis j’essayais de faire pareil, ça m’inspirait pour dribbler, mais je n’étais pas un joueur comme eux, j’étais moins doué qu’eux.

N'Golo Kanté à Caen
N'Golo Kanté à Caen©AFP/Getty Images

C’était frustrant de ne pas parvenir à faire ce que Maradona a fait à l’Angleterre en 1986 ?
Avec les amis, parfois il m’arrivait parfois de faire des choses exceptionnelles. Mais au niveau professionnel, je ne suis pas un de ces joueurs-là et je n’évolue pas au même poste.

En grandissant en banlieue parisienne, quels souvenirs gardez-vous de la Champions League ? Il y a-t-il des matches qui vous reviennent à l’esprit ?
À l’époque les matches étaient diffusés sur des chaines gratuites. On regardait sur TF1 et tout le monde avait la chance de regarder ces matches-là. Je me souviens de la reprise de volée de Zidane et l’un des gros matches dont je me souviens, c’était Liverpool-AC Milan, le come-back de Liverpool était magnifique. C’est l’un de mes premiers souvenirs de la Champions League.

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À Suresnes, des recruteurs sont venus, mais vous n’avez pas intégré de centre de formation. Est-ce que vous avez douté du fait de devenir professionnel ?
Quand j’étais jeune, j’ai effectué de nombreux tests, c’est vrai que ça n’a marché que très tard, quand je suis allé à Boulogne-sur-Mer. Mais je ne les ai pas vus comme des échecs mais des opportunités de me mesurer à ce qui se faisait en centres de formation. Pour certains, j’avais du retard, pour d’autres c’était du même niveau donc ils n’avaient pas d’intérêt à me faire venir. Mais je l’ai pris comme une opportunité de me mesurer à des joueurs de centres de formation. À cette époque-là, je n’avais pas la vision de me dire qu’il fallait passer par un centre de formation pour devenir professionnel. Je me suis dit que je donnerai le meilleur de moi-même quoi qu’il arrive et que cela pourrait se faire plus tard, différemment. Je pense que ces échecs-là m’ont construit.

Quels joueurs vous ont influencé ? On a cité Lassana Diarra ou Claude Makélélé. Regardiez-vous ces joueurs en vous disant « je vais faire cela, essayer d’intégrer cet aspect de leur jeu à mon style de jeu » ?
Il est vrai que quand j’étais jeune, les entraîneurs me disaient que je ressemblais à untel ou untel. Moi, je n’étais qu’un spectateur de football, je regardais les matches que j’aimais bien sans forcément faire une fixation sur les joueurs qui évoluaient à mon poste. L’équipe de France, c’était la sélection qu’on regardait durant la trêve internationale et quand on voyait des Makélélé ou des Lassana Diarra, ils m’ont inspiré à certains moments, mais je ne suis pas comme eux. Et pour les avoir côtoyés, ce sont des grands joueurs, qui ont fait leur carrière et moi je ferai la mienne.

Claude Makélélé est toujours lié à Chelsea. Avez-vous pu discuter avec lui depuis que vous êtes devenu un très grand joueur ? Parlez-vous de vos similitudes, vous donne-t-il des conseils pour améliorer votre jeu ?
On s’est rencontré quelques fois. Il y avait déjà Lassana Diarra que j’ai rencontré lors de mon premier rassemblement en sélection et j’ai vu le grand joueur qu’il était. Claude est avec nous à Chelsea. Les instructions, je les reçois surtout de mon entraîneur, pour organiser l’équipe, donner le meilleur pour elle. J’ai eu quelques échanges avec Claude depuis que je suis à Chelsea et il m’a donné des conseils sur mon jeu (...), ce que je peux travailler, améliorer. Échanger avec lui sur ces points-là ne peut être que bénéfique pour moi, il connaît le poste, le club et ses conseils ont toujours été utiles.

Kanté pose avec la Coupe du Monde
Kanté pose avec la Coupe du MondeAFP via Getty Images

Depuis le CFA2 à Boulogne jusqu’à la Premier League anglaise, est-ce que votre relation avec le ballon a changé. Que faut-il faire différemment entre le CFA2 et le top niveau ?
Je pense que déjà techniquement, c’est plus propre, c’est-à-dire qu’on peut se permettre moins déchet technique, c’est plus juste, ça va plus vite, il faut voir avant. C’est surtout la vitesse du jeu qui diffère. Mais ce n’est pas que le ballon. Il y a aussi l’aspect tactique de toute une équipe, le travail de toute une saison pour être performant et décrocher les résultats escomptés, une montée ou des titres. Je pense que c’est un travail de toute une saison que l’entraîneur effectue pour organiser une équipe qui se comprend et qui peut donner le meilleur d’elle-même chaque semaine à chaque match.

Les défenseurs cherchent à prendre le ballon aux attaquants, les attaquants aiment marquer. À quel moment vous êtes le plus heureux balle au pied ?
Je pense que c’est quand on fait ce qu’il faut au bon moment. Quand on garde le ballon s’il faut le garder pour soulager tout le monde, quand on trouve des passes qui permettent de marquer alors qu’on perd. Ça dépend du moment du match.

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À la perte de balle, quelle est votre première pensée ?
Se mettre dans une position de sécurité où on empêche l’adversaire de se créer une occasion. Ça peut être par un repli défensif, par un pressing. Mais la première idée est de se mettre dans la position idéale pour que l’équipe ne soit pas en danger.

C’est une improvisation ou cela n’est le fruit que des instructions de l’entraîneur ?
C’est un mélange des deux. Au début du match, on a les instructions de l’entraîneur, presser à tel moment ou rester bas à tel moment. Mais sur le terrain, on est livré à nous-mêmes, on décide nous-mêmes. On communique entre nous pour dire de presser ou de rester et l’entraîneur est là pour rectifier s’il le faut durant le match.

Au moment où vous récupérez le ballon, que regardez-vous en premier ?
Cela dépend de la situation du match. Si on gagne et qu’il faut garder le score, le principal sera de garder le ballon un moment et respirer. Si on doit marquer, il faut lever la tête et regarder les courses qu’il y a devant. Mais quand on récupère le ballon, il faut avant tout ne pas le perdre rapidement.

Il y a un moment dans un match où N’Golo Kanté est fatigué ?
Bien sûr que je suis fatigué. Durant les matches, il y a des temps forts et des temps faibles. Pendant les temps faibles, on essaye de récupérer. C’est une affaire de gestion du match. Parfois même quand on est fatigués, il faut y aller pour faire la différence offensivement ou garder le score et il faut passer outre cela. C’est au mental. Mais au cours de la saison, avec le staff, on essaye de gérer au mieux l’enchaînement des matches, c’est-à-dire gérer les entraînements, allonger la récupération…

Riyad Mahrez et N'Golo Kante, coéquipiers à Leicester
Riyad Mahrez et N'Golo Kante, coéquipiers à LeicesterLeicester City FC via Getty Imag

Quand vous faisiez vos débuts en Ligue 2 avec Boulogne, Riyad Mahrez avait joué neuf matches avec Le Havre. Neuf ans plus tard, vous êtes tous deux en finale de Champions League. En tant qu’anciens coéquipiers à Leicester, vous avez eu l’occasion de discuter de cette finale ?
Oui. Je pense qu’on réalise tous les deux que c’est exceptionnel. C’est le résultat de beaucoup de travail avant la Ligue 2 et depuis. Beaucoup de travail et de passion. Jouer ce genre de matches, c’est fantastique. Lui comme moi, on souhaite gagner, mais on est contents d’être là.

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