Ronaldinho a sonné la révolte

"Il vous arrive de croiser de belles personnes qui n'ont pas de tête." Interrogé sur l'état de la pelouse de Stamford Bridge avant le coup d'envoi du match contre le FC Barcelona, c'est sur le ton ironique qu'a répondu l'entraîneur du Chelsea FC José Mourinho. "Et parfois, des gens physiquement disgracieux sont très intelligents, comme les scientifiques. Notre terrain est un peu comme ça." Ces paroles se sont avérées prophétiques, la puissance l'a emporté sur le style la majeure partie du huitième de finale aller mardi avant que le joueur le plus stylé qui soit, Ronaldinho, fasse son show en fin de partie.

Un échauffement à part
Lors de l'échauffement du Barça, le meneur de jeu brésilien a fait le spectacle à lui tout seul. Alors que ses coéquipiers sautaient, pivotaient et sprintaient dans leur combinaison jaune fluo, Ronaldinho, 25 ans, rôdait sur les bords du terrain, le ballon dans les pieds, incapable de dribbler correctement d'une ligne de touche à l'autre. Lorsque les visiteurs se sont ensuite dirigés vers le tunnel pour terminer leur préparation, le Brésilien est resté sur la pelouse et s'est fait une joie d'alimenter des bataillons de ramasseurs de balles en passes lobées derrière le but.

Cohésion défensive
Il devait débuter la partie sur le même registre, se familiarisant avec cette pelouse boueuse sur l'aile gauche avant de repiquer au centre du terrain en annonçant sa présence par une talonnade nonchalante. Il montait d'un cran quelques instants plus tard mais la trajectoire du ballon de Lionel Messi était spectaculairement coupée par Ricardo Carvalho d'une volée. Le ton de la première période était donné. Le jeu construit des visiteurs catalans était impressionnant, mais Chelsea parvenait à repousser le danger.

Del Horno expulsé
Ronaldinho n'était finalement pas à l'origine des actions les plus tranchantes de Barcelone en première période. Le prodige argentin Lionel Messi a représenté la plus grande menace notamment lors du choc avec Asier Del Horno qui a entraîné l'expulsion du défenseur des Blues. Chelsea restait toutefois dans le coup avec l'entrée en jeu de Geremi en défense et surtout l'ouverture du score, contre le cours du jeu, après le but contre son camp du Catalan Thiago Motta juste avant la soixantième minute.

Le tournant
La mise en action de Ronaldinho ne devait pas tarder. Quasi invisible jusque-là, il passait alors la surmultipliée et c'est sur un coup franc enveloppé que le malheureux John Terry trompait son propre gardien Peter Čech pour l'égalisation catalane. Le Barça s'engouffrait alors dans la brèche de l'armure londonienne, désorganisant lors de vingt dernières minutes frénétiques une défense jusque-là bien ordonnée. Après de nombreux assauts sur la cage de Chelsea et autant de dégagements sur la ligne et de sauvetages, Samuel Eto'o donnait l'avantage au Barça de la tête. Un renversement de situation impensable que l'on doit à la botte magique de Ronaldinho.

Un air de déjà-vu
Son influence sur le jeu avait été si minime en première période que les supporteurs de Chelsea y étaient allés d'un "Qui es-tu ?" auquel le Brésilien répondait avec aplomb après la pause. Les hommes de Mourinho ne doivent pas perdre espoir pour autant. La saison dernière au même stade de la compétition, Eto'o avait déjà marqué le but de la victoire catalane. Ce soir-là, Chelsea avait pris les devants grâce à un but contre son camp barcelonais avant de se faire rattraper et dépasser dans les 23 dernières minutes de la partie alors que les Blues étaient réduits à dix. Grâce à une défense en acier, Chelsea était resté dans le coup et grâce à un succès 4-2 au retour s'était qualifié pour la suite (tot. 5-4).

Chelsea a sa chance
La différence tient évidemment à ce que la saison dernière le match aller avait eu lieu au Camp Nou et que Chelsea avait fait la différence chez lui au retour. Cette fois, les Blues ne pourront pas compter sur l'avantage du terrain et marquer au moins deux buts. Mais si les hommes de Mourinho peuvent mêler intelligence et beau jeu comme l'a fait le Barça pendant une demi-heure.